2014/11/12-IR – Whitechapel Orphenage, Londres, Grande-Bretagne – [Recrutement de José Boogie initialement Phileas Smith] – Une envie d'air frais

La sollicitude trop pressantes des bobbys entraîna des protestations que José s'efforçait de ne pas rendre trop véhémentes afin de ne pas éveiller la méfiance des deux hommes. Mais les explications restaient quand même assez embrouillées et plutôt de nature à demander un complément d'information.

"Ta tata Jeannette ?", demanda le policier. "Quel est son problème ?"

"Allez, on te ramène !", trancha son collegue. "Où habi… Eh reviens !"

La fuite du gamin, certes d'un petit trot tranquille, surprit un court instant les deux policiers. Mais, sans perdre un instant, ils s'élancèrent à sa poursuite, désireux de tirer au clair la situation. Pour eux, il n'y avait aucun doute, ils étaient en présence d'un de ces nombreux vagabonds qui erraient dans les rues de Londres. Le fait qu'il soit si jeune était, certes, un motif d'apitoiement mais ne justifiait pas de le laisser faire.

"Arrête-toi !", cria le bobby en allongeant la foulée pour rattraper José.

Bien sûr, loin d'obtempérer, le gamin accéléra à son tour, comptant certainement sur sa vélocité pour semer ses poursuivants. Dans son dos lui parvenait le bruit pesant des lourds godillots frappant les pavés, faisant jaillir des gerbes d'eau des nombreuses flaques qui avaient envahi la chaussée.

Au bout de quelques secondes d'une course aveugle, José sentit une main le saisir au collet, brisant net ses velléités de fuite. La moustache se décollant sous l'effet de la pluie, le gamin fit face au policier qui venait de le rattraper, alors que son collègue arrivait à leur hauteur, essayant de retrouver sa respiration.

"Tu vas nous suivre au poste.", déclara l'homme en affermissant sa prise sur les vêtements de José. "On tirera ça au clair là-bas. Tiens-toi tranquille et ne nous oblige as à te passer les menottes…"

Sans laisser au garçon la possibilité de tenter de leur fausser à nouveau compagnie, les policiers l'escortèrent sous la pluie jusqu'au commissariat de quartier. Une fois à l'abri, le jeune orphelin se retrouva dans un bureau miteux, face à un jeune inspecteur mal rasé, visiblement agacé de devoir abandonner le film passionnant qu'il regardait pour aller interroger un vagabond sans intérêt.

"Bon, assis-toi.", dit-il d'une voix lasse. "Nom, prénoms, date et lieu de naissance ?"

Tout en parlant, l'homme avait ouvert l'ordinateur portable qui se trouvait sur le bureau et s'apprêtait à saisir les renseignements demandés. Voyant le gamin trempé qui dégoulinait sur le paquet vétuste, il lui lança une serviette de toilette en criant à l'attention d'un de ses subordonnés.

"Trouvez-lui des vêtements secs aussi et prévenez les services de l'enfance. On est pas une garderie non plus…"

Pendant que le gamin bredouillait les informations demandées tout en s'essuyant vaguement le visage avec la serviette que l'inspecteur venait de lui lancer, l'homme avait replongé la tête sur son ordinateur et tapait sur le clavier sans lever les yeux sur son vis-à-vis. Perdu dans cet obscur poste de police d'un quartier quelconque de Londres, José redevenait Phileas, le pauvre orphelin, et entendait le martellement régulier des doigts sur les touches.

Son avenir immédiat était lié au bon vouloir d'un homme indifférent au sort qui allait être le sien et pressé de se débarrasser de ce problème pour pouvoir retourner à une activité bien plus intéressante à ses yeux.

"Bon, Phileas, que faisais-tu dehors, à une heure aussi tardive et à une telle distance du Whitechapel Orphenage ?", demanda-t-il par pur formalisme. "Personne ne nous a encore signalé ta disparition. Il doivent bien dormir là-bas…"

Un policier tenant à la main un pull épais en laine grise entra dans le bureau et dispensa le garçon de répondre immédiatement.

"Monsieur l'inspecteur, les centres sociaux sont complets et nous n'arrivons pas à joindre l'orphelinat.", annonça-t-il en tendant le vêtement informe à Phileas. "Ils nous disent de le garder pour la nuit et de procéder à son transfert au matin…"

"Mais bien sûr !", s'emporta l'inspecteur. "On a l'infrastructure pour héberger un mineur... Je le case où, moi ? Dans la cellule avec les ivrognes ou dans celle des prostituées ? Bon, OK, vous pouvez disposer."

Sans se faire prier, le policier quitta rapidement le bureau, ne tenant pas à subir plus longtemps la mauvaise humeur de son supérieur. Reportant son attention sur Phileas, l'inspecteur poussa un profond soupir d'exaspération.

"Je vois que tu n'en es pas à ta première tentative… Tu files un mauvais coton, c'est moi qui te le dis..."

Haussant les épaules d'un air blasé et indifférent, le jeune inspecteur ne réagit pas à l'accès de mauvaise humeur de Phileas, pas plus qu'il ne prit la peine de répondre à sa question en déclinant, lui-aussi, son identité. L'opinion d'un gamin fugueur ne revêtait aucune espèce d'importance pour l'homme, certainement beaucoup plus intéressé par la perspective de retourner devant son écran de télévision que de connaître l'avenir du gamin qui se trouvait devant lui.

"Marvin !", appela-t-il en haussant le ton, ignorant Phileas devant lui. "Tu me libères une cellule et tu y colles le mouflet pour la nuit. Je veux qu'il soit seul dedans. Demain, tu le ramèneras chez lui, sous bonne garde pour pas qu'il essaie de te fausser compagnie..."

Phileas sentit une main épaisse se poser sur son épaule et le guider vers la porte du bureau.

"Allez viens, petit. Je vais te montrer ta chambre.", ironisa le policier, avec une pointe de tristesse dans la voix. Il ne se voulait pas moqueur mais essayer de plaisanter pour détendre l'atmosphère. Visiblement, l'homme n'était pas insensible au sort du gamin mais n'irait surement pas se mettre en travers de la machine judiciaire pour le soustraire au sort qui était le sien.

Le jeune orphelin dut attendre que deux femmes, très légèrement vêtues malgré la fraîcheur de la température extérieure, ne soient expulsées de la cellule, malgré force protestations, pour y entrer à son tour. Une simple planche de bois servait de banquette et de couchette et une couverture fut apportée pour aider le gamin à résister au froid.

La grille se referma et fut verrouillée brisant net toute chance d'évasion pendant le reste de la nuit. Assis sur sa couchette inconfortable, Phileas se blottit sous la couverture et finit par se mettre à somnoler. À quel moment finit-il par s'endormir, il aurait été bien incapable de le dire. Toujours est-il qu'il finit par ouvrir les yeux, un rayon de soleil le frappant directement sur le visage et lui faisant froncer les sourcils.

Surpris, le garçon se redressa à moitié. Il ne se trouvait plus dans sa cellule vétuste mais dans une chambre confortablement aménagée. Le matelas était nettement plus moelleux que la planche qui lui avait servi de couchette au poste de police. Sur le mur en face de lui, un écran géant de télévision était éteint.

Sortant du lit, Phileas réalisa à cet instant qu'il était entièrement nu. Sur le sol, étaient posés divers habits parfaitement à sa taille : chaussettes et caleçons blancs, t-shirt de couleur orange sur lequel figurait un bébé ailé assis sur un globe terrestre surmontant l'inscription CHERUB, pantalon de treillis kaki et paire de rangers. Il n'y avait aucune trace de ses anciens vêtements dans la chambre.

Par la fenêtre, le garçon avait une vue plongeante sur un terrain de sport en contrebas. Sur la piste d'athlétisme, de nombreux enfants âgés de neuf à quinze ans s'entraînaient sous la direction de deux ou trois adultes. Il devait être environ dix heures et l'estomac de Phileas lui signalait que l'heure du petit déjeuner était passée...

La preuve humaine du déclin de la gloire de la Metropolitan Police se trouvait face à Philéas, c'était désormais une certitude, pire, une infâmie qui déshonorait le badge et l'uniforme. Où étaient Hercule Poirot et tous les héros grandiloquents des polars quand on les cherchait ? Même pas un nom, rien, nada, niet. Quand l'autre policier amena Phileas vers ses quartiers, le gamin jeta un dernier regard dédaigneux à l'officier de l'ordre qui l'avait condamné, claqua sa langue et lâcha un audible "Tsssssss".

Il accompagna ensuite sagement son subordonné. Ce dernier semblait plus tendre, semblait comprendre, Phileas se dit même un instant qu'il serait peut-être attendri et tenterait quelque chose pour son bien, mais le mieux qu'il fit fut de virer deux prostituées d'une cellule pour y laisser pénétrer, tranquillement l'enfant. Il se prit à penser un moment. Penser à ce qu'il allait subir en rentrant à l'orphelinat, au fait que Ruiz serait sûrement envoyé pour le récupérer et se ferait sûrement une joie de s'occuper de son cas personnellement. A force de penser, il s'assoupit.

***

Il n'imaginait pas possible d'aussi bien dormir sur la misérable paillasse d'un prisonnier, il n'imaginait pas que la flicaille le laisse somnoler si longtemps. L'oreiller était moelleux et les couvertures bien chaudes, il s'étira tranquillement et réalisa soudain ce qui n'allait pas se relevant en sursaut. Il était nu, dans une chambre inconnue, dans un lieu inconnu, et surtout, il avait faim. Des yeux il chercha ses affaires, son sac, sa moustache, quoi que ce soit, sa moustache au moins, pour la contenance. Rien, seuls un treillis et un t-shirt marqué par un étrange imprimé gisaient là. Il les enfila rapidement et en profita pour vérifier qu'il n'était pas blessé. Il se demandait s'il avait été abusé à l'aide d'une drogue quelconque glissée dans un breuvage, mais il n'avait rien bu depuis bien longtemps, aussi l'explication ne semblait pas probable. Observant à l'extérieur un instant les terrains et les exercices auxquels se livraient les enfants il décida que, même s'il n'était que Phileas, il se devait d'aller enquêter. Il ouvrit donc la porte de sa chambre et d'un pas moins que décidé, il se dirigea dans le couloir. A peine sortit de sa chambre et la porte fermée, il hésita à nouveau et regarda à gauche et à droite, un peu perdu.

À sa sortie de la chambre, Phileas s'aventura dans un couloir. Sa configuration et son apparence, quoique plus propres et plus modernes, étaient semblables à celles des dortoirs de l'orphelinat dans lequel il vivait. Il y croisa d'autres pensionnaires, plus vieux que lui, vêtus de la même tenue, à la différence de la couleur du t-shirt qui était noire, bleu marine ou grise. À chaque question, le gamin obtenait la même réponse sibylline "On n'a pas le droit de parler aux oranges !", accompagnée d'un geste du bras lui indiquant une direction à suivre.

Commençant à se demander s'il ne participait pas à une sorte de rituel d'initiation pour les nouveaux arrivants, l'orphelin se laissa guider par ce mystérieux jeu de piste et parvint au rez-de-chaussée, dans un vaste hall de réception. Derrière les baies vitrées, se tenait une fontaine d'où s'élevait un jet d'eau, représentant un globe sur lequel était assis un bébé ailé, semblable au logo figurant sur le t-shirt.

S'approchant du guichet d'accueil, il fut pris en charge par la femme qui se tenait derrière.

"Bonjour Phileas, tu es pile à l'heure. Madame Moore t'attend dans son bureau."

Sans ajouter un mot, elle l'accompagna jusqu'à une double porte à laquelle elle frappa avant de laisser entrer le gamin.

La porte s'ouvrit sur une vaste pièce dont la douce chaleur tranchait avec la météo extérieure. Chaleur physique accentuée par la flambée provenant de la cheminée, chaleur plus morales causée par le mobilier rustique et les rayonnages de livres aux reliures de cuirs.

Assise derrière un bureau de style victorien, une femme de petite taille fixait le jeune garçon derrière ses lunettes aux verres épais. Ses mains, posées à plat sur le meuble, encadraient un dossier fermé sur lequel était inscrit un nom à l'encre rouge "Phileas Smith".

"Bonjour, monsieur Smith.", dit-elle d'une voix calme, légèrement monotone. "Asseyez- vous, je vous en prie…"

Laissant à son visiteur le temps de s'installer, la femme reprit :

"Je m'appelle Eleutheria Moore et je suis la directrice de cet établissement.", commença-t-elle. "Je suis vraiment désolée mais nous avons dû vous administrer un sédatif pour vous amener ici. Je suppose que vous vous sentez un peu plus reposé et que vous n'éprouvez aucun effet secondaire…"

Simples constatations qui n'appelaient pas vraiment de réponses de la part du jeune garçon.

"Bienvenue à Cherub. Vous êtes ici sur un Campus d'un genre assez particulier, regroupant moins de trois cents pensionnaires et disposant, entre autre, de quatre piscines, six cours de tennis couverts, un terrain de football, un stand de tir et maintes autres installations que vous pourrez découvrir. Nous avons notre propre établissement scolaire. Les classes ne comptent pas plus de dix élèves et chacun d'eux étudie au moins deux langues étrangères. Nous avons davantage d'étudiants admis dans les universités que les meilleures écoles privées du pays."

Pendant cette énumération, le regard de la directrice restait fixé dans celui de Phileas, à l'affut de la moindre réaction du jeune garçon.

"Pour être admis parmi nous, chaque élève doit satisfaire à deux critères.", poursuivit-elle. " Tout d'abord, il doit réussir l'examen d'entrée. Ensuite, il doit accepter de faire partie des services de renseignements britanniques. C'est assez inhabituel, je vous l'accorde, mais vous êtes intelligent, en bonne condition physique et vous savez faire preuve d'obstination et de constance dans vos décisions."

Retirant ses lunettes, la femme les nettoya lentement, sans hâte excessive.

"Il n'a pas été facile de vous soustraire à la curiosité de la police londonienne mais n'en parlons plus.", commenta-t-elle avec un léger rictus qui pouvait passer pour un sourire amusé. "Monsieur Smith, que pensez-vous de tout cela ? Voulez-vous tenter votre chance et venir nous rejoindre ?"

Eleutheria Moore arqua un sourcils de feinte surprise devant cette avalanche de questions. Remettant lentement ses lunettes en place, elle fixa son regard dans celui du jeune garçon.

"Bien sûr, monsieur Smith, ce choix vous appartient entièrement.", répondit-elle toujours aussi calmement. "C'est à vous de déterminer si vous vous sentez capable de rester parmi nous. Nul ne vous y oblige..."

Un sourire un peu triste plissa le visage ridé.

"Si vous choisissez de repartir, notre entrevue n'aura jamais existé et vous ne serez même pas venu en ces lieux.", expliqua-t-elle sans émotion apparente. "Je suppose, en effet, que vous retourneriez au Whitechapel Orphenage. Du moins si celui-ci acceptait de vous garder après votre tentative de fugue."

Le ton n'était pas menaçant, la femme se contentait d'énoncer posément une vérité.

"Je dois quand même vous avouer que c'est ce qui vous attend si vous décidiez de passer les tests et que vous y échouiez.", conclut-elle. "Alors, monsieur Smith ? Quelle est votre réponse ?"

Eleutheria Moore ne fit aucun commentaire lorsque Phileas aborda, sans s'y attarder, la possibilité qu'il racontât sa visite au Campus. La conclusion du gamin était sans faille. Qui irait croire un jeune fugueur, à l'imagination déjà bien débordante, qui prétendrait avoir reçu une "offre d'emploi" de la part des services secrets, d'atant plus que ce jeune fugueur se révélerait incapable de situer géographiquement l'emplacement de la base où il aurait été conduit pour y recevoir cette étrange proposition...

Un discret sourire plissa le bas du visage de la directrice à la demande, qui pouvait paraître incongrue, de retrouver sa moustache pour pouvoir augmenter ses chances devant les tests qui s'annonçaient. Ouvrant le dossier posé devant elle, elle dévoila le postiche qu'elle avait manifestement prévu de donner à l'intéressé.

"Mais, bien entendu, monsieur Smith...", sourit-elle. "Que serait Sherlock Holmes sans sa loupe ou José Boogie sans sa moustache ?"

Comment la vieille femme pouvait-elle être au courant de l'identité secrète que s'était forgé le gamin ? Cela resterait surement un mystère, toujours est-il qu'elle lui tendit sans hésitation le précieux accessoire.

"Je vais vous confier aux bons soins de monsieur Gleen qui va vous accompagner. Une fois que vous aurez passé l'ensemble des tests, revenez donc me voir et nous ferons un point sur vos performances."

À ce moment, la porte s'ouvrit sur un garçon âgé d'environ quatorze ans et portant un t-shirt bleu marine.

Un léger sourire aux lèvres, ce dernier fit signe à Phileas de le suivre, laissant à peine le temps au gamin de coller la moustache au dessus de sa lèvre supérieure. Une fois dans le couloir, la porte du bureau refermée, il donna au jeune orphelin une bourrade amicale avant de commenter.

"Salut, moi c'est James. Et toi ?", demanda-t-il sans plus de façon. "Jolie moustache en tout cas..."

Sans plus de formalisme, James entraîna alors José vers le dojo pour sa première épreuve. Il se retrouva face à un gamin en kimono qui devait facilement avoir deux ans de moins que lui. En dépit de cette différence d'âge, ce dernier le battit avec une facilité déconcertante.

Son orgueil passablement mis à mal, l'aspirant agent fut ensuite propulsé en salle de classe, face à une série d'exercices scolaires tous plus compliqués les uns que les autres, et il transpira abondamment pour essayer de venir à bout des différentes questions.

Puis, armé d'un stylo bille, il se trouva face à face avec un poulet vivant. Très sérieusement, James lui expliqua qu'il devait tuer rapidement cet animal car le cuisinier attendait de l'ajouter au menu du prochain repas.

Ensuite, José dut faire face au parcours d'obstacles. Constamment perché à une dizaine de mètres du sol, il dut affronter un enchaînement d'échelles de corde, tyroliennes, plates-formes et autres poutres qui semblait ne jamais vouloir finir.

Enfin, le garçon dut se mouiller, au propre comme au figuré, pour aller chercher une brique au fond du grand bassin de la piscine et la rapporter jusqu'au bord opposé. Y parvenir sans perdre sa moustache dans l'aventure ne fut pas une mince affaire...

Durant tous ces exercices, James était resté avec lui, lui prodiguant quelques brefs encouragements entrecoupés de plaisanteries amicales, sans jamais critiquer ses échecs. La bonne humeur du t-shirt bleu marine était contagieuse et largement de nature à inciter José à se surpasser.

Puis, quelques heures plus tard, les deux garçons se retrouvèrent dans le bureau de la directrice. Un demi-sourire aux lèvres, James encouragea José à aller s'asseoir, tandis qu'il prenait position en retrait, immobile, les mains dans le dos.

[HRP]Je te laisse décrire ces quelques heures du point de vu de José. Donne-nous ses ressentis devant les différents tests et la façon dont il les a, ou pas, surmontés.[/HRP]

Quelques longues secondes s'écoulèrent avant qu'Eleutheria Moore ne prenne la parole. Pendant ce silence interminable, la directrice avait fixé du regard le gamin assis devant elle, une moustache postiche encore humide collée sous le nez. Aucun muscle du visage de la femme ne bougeait, apportant une information quelconque sur les pensées qu'elle devait avoir.

"Détendez-vous, monsieur Smith.", lui dit-elle enfin, alors qu'un discret sourire étirait ses lèvres. "Dans l'ensemble, votre prestation a été tout à fait honorable."

Visiblement, les différents résultats étaient déjà parvenus à la directrice de CHERUB, lors même que José venait à peine de terminer la dernière épreuve. À moins que la femme, par un moyen quelconque n'ait suivi en direct les dernières péripéties…

"Vous avez su reconnaître votre défaite a dojo, après avoir néanmoins essayé de terrasser Peter. Nous apprécions ce courage réfléchi qui sait ne pas se montrer présomptueux… Vos résultats scolaires montrent une faculté de raisonnement et un esprit de déduction prometteurs. Attention toutefois à ne pas laisser votre romantisme littéraire vous pousser vers la rêverie… La façon dont vous avez abordé votre face-à-face avec le poulet m'a agréablement surprise. Une fois que vous avez obtenu la certitude que l'acte n'était pas gratuit, vous avez accompli avec précision ce que nous attendions de vous. Votre "victime" est d'ailleurs déjà aux cuisines et, si vous le voulez bien, nous le mangerons ensemble. Du moins si vous et monsieur Green acceptez de déjeuner avec moi… Vous semblez avoir éprouvé quelques difficultés sur le parcours aérien mais elles semblent ressortir, avant tout, d'un manque de technique, chose qui se corrige très aisément… Quant à l'épreuve finale de natation, je suis heureuse de voir qu'elle n'a pas eu raison de votre moustache…"

Ouvrant le dossier du garçon, jusqu'alors posé devant elle, Eleutheria Moore griffonna quelques annotations rapides.

"Si vous le souhaitez toujours, j'ai le plaisir de vous annoncer que vous êtes autorisé à intégrer le département CHERUB. Après le repas, nous allons vous ramener à l'orphelinat pour que vous puissiez y prendre vos affaires. Officiellement, par mesure disciplinaire en raison de votre fugue, vous allez être transféré dans un autre établissement. Inutile de vous demander la plus grande discrétion sur les raisons réelles de ce transfert."

Se levant, la femme indiqua que l'entretien était terminé.

"Monsieur Green va rester avec vous pour vous faire visiter un peu le site. Nous nous revoyons à midi vingt-cinq précise pour le déjeuner.", conclut-elle. "Il faudra également songer à vous choisir un pseudonyme. Phileas Smith a vécu et un agent de CHERUB doit naître. José Boogie pourra peut-être apparaître au grand jour…"

Encore sous le coup de la fatigue, José suivit James à l'extérieur du bureau. La directrice venait de confirmer, une nouvelle fois, que l'identité secrète que le garçon s'était forgée n'était pas un secret pour elle. Non contente de posséder des yeux et des oreilles partout, serait-elle, en plus, capable de lire dans les pensées de ses interlocuteurs ?

"Félicitations, mec !", lui lança le t-shirt bleu marine en lui assenant un bourrade amicale sur l'épaule. "On va aller se dégourdir les jambes. Au fait, qui est ce José Boogie dont parle la vieille chouette ?

"Monsieur Green, dépêchez-vous.", le coupa une voix venant de derrière la porte qu'il venait de refermer. "Ne perdez pas de temps en bavardage et jouez votre rôle de guide."

Rougissant brusquement, James entraîna rapidement José pour mettre une distance respectable entre eux et la femme qui avait décidément la manie de savoir beaucoup trop de chose.

Dans l'après-midi, après un rapide déjeuner avec la directrice au cours duquel le garçon eut le loisir de découvrir l'immense culture générale de la femme, José redevint Phileas quelques heures, le temps de faire un passage au Whitechapel orphenage pour y prendre ses effets personnels avant de revenir au Campus.

Assez rapidement, le garçon troqua son t-shirt rouge contre un de couleur bleu ciel. Puis, après avoir souffert cent jours en compagnie, entre autre, d'un jeune Pakistanais prénommé Sandji, il obtint le statut d'agent opérationnel et attend, depuis, le moment de faire ses preuves sur le terrain.

[HRP]Voila qui conclut ta phase d'introduction. J'espère que celle-ci t'aura intéressé.

Essaie néanmoins, à l'avenir, d'avoir un rythme un peu plus régulier. Tu peux maintenant créer ta fiche dans la rubrique Evolution des agents en lui donnant comme titre ton nom, suivi de ton prénom. Une fois ce sujet créé, il faudra, dans un premier post y répartir tes 12 points initiaux (correspondant à ton âge). Pour ces points initiaux, tu devras obligatoirement, en raison de ton historique, placer un minimum de un point en "endurance" (saut à la corde et course à pied),  "souplesse" (gymnastique), survie et crochetage. Il te faudra également placer un point en "langues" et indiquer quelle langue étrangère José Boogie a été contraint d'apprendre au cours de la première partie de sa formation.

Puis, dans un deuxième temps, tu pourras le compléter dans un nouveau post, avec les 2 points gagnés lors de ta première aventure.

Comme dit précédemment, la phase du programme d'entraînement initial n'est pas jouée en mode RP. Par contre, la durée nécessaire à cet entraînement doit être prise en compte dans ton historique. Toute ton aventure s'est donc déroulée fin 2014 avec un PEI s'étant achevé en mai 2015.

Félicitation pour ton t-shirt gris durement gagné.  

Tu peux, si tu le souhaites, réagir une dernière fois à ce sujet et poster librement, en mode vie, dans l'enceinte du Campus.[/HRP]

José Boogie était resté assis devant la directrice avec une calme angoisse qui montait peu à peu en lui. Travaillant son suspense, la vieille dame avait laissé le temps se suspendre pendant quelques secondes qui avaient été les secondes les plus courtes de la petite vie de l'orphelin. Il avait l'impression de passer par toutes les étapes du stress et du deuil pendant cette attente. José Boogie l'aventurier était dans la tourmente !

Il était sous choc depuis le début, il avait un instant refusé d'y croire, un déni total, il ne rentrerait jamais dans Cherub, il était trop nul pour ça et ça le rendait fou, fou de colère. Peut-être qu'il aurait pu négocier, appuyer sur le fait qu'il était fatigué à la fin, où qu'il avait commencé sa nuit sur une paillasse de cellule ? Parce que si tout ne marchait pas c'était avec assurance le retour vers une vie de tristesse et de solitude. Mais en même temps, il pourrait toujours s'échapper à nouveau d'un orphelinat, oui, même s'il n'était pas pris, tout ça marcherait quand même, peut-être qu'il pourrait retourner dans la bois après une nouvelle escapade, non ? Ses émotions l'emportèrent tellement qu'il n'entendit pas bien le début des commentaires de Madame Moore.

Puis, réalisant qu'elle parlait tendit un peu l'oreille, toujours effrayé. Il réalisa soudain qu'elle était en train de lui dire qu'elle était satisfaite. José se détendit alors, plus les choses avançaient, plus il réalisait qu'il était bien, qu'il était bon, et que, plus que jamais, l'appel de l'aventure était au tournant. Il lui faudrait peut-être un chapeau pour compléter son attirail. Histoire de faire les choses correctement. Lorsqu'Euleutheria Moore eut fini sa tirade, José se leva et laissa Phileas sur la chaise, c'était fini pour lui.

"Rien ne me ferait plus plaisir madame la directrice. Vivement que la moustache deviennent une vraie, ce sera plus pratique."

Il sortit ensuite avec James qui se montrait interrogateur par rapport à l'identité de José Boogie et félicita le petit garçon qui rétorqua le plus naturellement du monde avec le sourire timide et l'oeil pétillant.

"Bah... c'est moi !"

[HRP : Merci pour la phase courtier et désolé pour ma constante procrastination, faut pas hésiter à me frapper sur skype de temps en temps ]

Épilogue

Le départ de Phileas Smith du Whitechapel Orphenage passa complètement inaperçu dans un établissement habitué à subir un taux de rotation élevé de ses pensionnaires. Ayant bien reçu une brève note l'informant du transfert du jeune orphelin, la directrice ne s'étonna même pas du non-respect de la procédure qui aurait voulu que le dossier administratif "suive".

Raoul Ruiz resta encore quelques années comme surveillant dans cet orphelinat avant de se lancer dans une carrière de styliste dans laquelle il cherche toujours à percer, sa ligne de vêtements pour adolescents "Parfum d'évasion" ne connaissant pas le succès commercial espéré.

Myka, Rio et Thomas eurent rapidement un nouveau camarade de chambre et oublièrent très vite le précédent locataire.

Nul ne sait vraiment l'usage qu'Alex Rider fit de "l'objet sous cellophane" qu'il avait confisqué à Phileas mais ni la petite Janet, ni la directrice n'y jouèrent un rôle quelconque.

L'inspecteur fut surpris de recevoir au milieu de la nuit la visite de deux représentant du "Gouvernement" venus procéder au transfert de Phileas, transfert s'effectuant dans une ambiance médicalisée, sans que le garçon ne semble manifester la moindre velléité de se réveiller. Néanmoins, en fonctionnaire scrupuleux et soucieux de ne pas se mêler des affaires de ses supérieurs (c'est toujours mauvais pour l'avancement...), il se hâta d'oublier cet incident qui l'avait pourtant empêcher de profiter pleinement de la vidéo qu'il comptait regarder pendant sa permanence.

Quant aux deux bobbys, le dénommé Marvin et son collègue, ils poursuivirent leurs rondes et interventions de façon rigoureuse mais machinale, Phileas n'étant qu'un des trop nombreux vagabonds qui se faisaient régulièrement ramasser dans la rue.