2015/02/17-IM – Northampton, Grande-Bretagne – [Mission d'introduction de Hazel Curtis] – Une souris chez les rats

Bon. Deux cartons volumineux et lourds, voilà qui ne l'avançait pas beaucoup. En revanche, la femme observant la camionnette lui fit froncer les sourcils. Elle avait déjà vu cette silhouette quelque part, sans réussir à la remettre exactement. Il aurait fallu qu'elle soit plus proche, et surtout qu'elle ait le temps de détailler plus avant le visage. Le fait que les hommes disparaissent à nouveau dans l'immeuble laissait à supposer qu'ils allaient remonter à l'appartement. Ils n'avaient pas terminé de vider le cagibi, sans doute. A moins qu'ils ne veuillent autre chose?

En tous les cas, elle en tira une conclusion préliminaire: elle n'était pas la seule à jouer les espions. Restait à savoir pour qui travaillait la dame chaudement vêtue. Un autre agent bossant pour Baxton? Une indépendante? Un membre discret de la famille Kinston? Des concurrents aux affaires des messieurs Kurt et Malpoli? En tous les cas, elle ne tenait pas particulièrement à se faire remarquer. Hazel tendit l'oreille quelques secondes. Soit ils prenaient leur temps et elle aurait le temps de changer de planque pour privilégier la baignoire, lieu rarement fouillé, soit elle n'y arriverait pas et garderait la porte, en espérant qu'effectivement, ce qu'ils voulaient se limitaient au cagibi.

Intriguée, Hazel se glissa dans l'entrée de l'appartement, les sens aux aguets. Il s'agissait de ne pas se faire surprendre par les deux hommes qui ne pouvaient que remonter terminer leur étrange déménagement. Les marches craquaient sous leur poids, rythmant leur progression dans l'escalier.

La porte du petit cagibi avait mal été refermée et bâillait sur un étrange inventaire. Sur les étagères, s'entassaient des emballages divers : lecteurs MP3, téléphones portables, lecteurs DVD. A même le sol, des consoles de jeux vidéo étaient posées. Toutes ces marchandises étaient flambant neuves et encore dans leur conditionnement d'origine.

Le bruits des pas se rapprochait de façon inquiétante. Hazel n'eut que le temps de faire un bond en arrière pour se réfugier à nouveau dans le petit bureau. Tremblante, elle se dissimula une nouvelle fois derrière la porte, croisant les doigts pour ne pas être découverte alors que les deux hommes entraient dans le studio de danse.

Soudain, la jeune fille sentit son téléphone vibrer sourdement dans la poche de son pantalon.

Du recel. Madame Kinston faisait dans le recel. Ce n'était pas très reluisant. D'où venait la marchandise? Des stocks de magasins cambriolés? Du vol de transport de marchandise? S'agissait-il de produits de marques ou de contrefaçons? Pour ce qu'elle en avait apperçu, et pour les quantités peu convenable pour une femme seule avec sa fille, elle pecherait plutôt pour la première option. Ce n'était que du recel. Jusqu'où allait le réesaux? Le duo casseur devait certainement compter comme les cambrioleurs/transporteurs du matériel. Si Kinston revendait. restait à déterminer si elle était le boss, ou juste la stockeuse. En tous les cas, tout ce beau petit monde flirtait allègrement avec l'illégalité. De quoi occuper des employés juridiques pendant une année minimum.

De retourdans sa planque, Hazel tâcha de rester le plus discret possible. Mais c'était mal barré. La vibration de son téléphone portable manqua de peu de la faire sursauter. Sans même chercher à le sortir, elle glissa la main dans sa poche pour raccrocher au nez de l'importun. Pas de pitié. Si elle se faisait avoir, elle n'aurait aucun moyen de prévenir rapidement son contact. Elle préférait passer pour grossière et ensuite rappeler la personne, plutôt que de se faire pincer et ne plus avior le moindre moyen simple d'appeler à l'aide.Dans son mouvement, elle se plia sensiblement pour tâcher d'étouffer tout son possible.

Quel était le crétin qui se permettait d'appeler à un moment pareil ? Car il s'agissait d'un vrai coup de fil et pas d'un simple SMS... Peu de personnes possédaient ce numéro en plus car le téléphone n'avait été activé que pour cette mission spécifique... Enfin, il serait toujours temps de répondre plus tard, quitte à s'excuser platement d'avoir raccroché au nez.

Tout en pestant intérieurement, Hazel interrompit net l'appel, priant pour cet incident soit passé inaperçu.

Dans l'entrée, à l'arrivée des deux hommes avait succédé un bruit de cartons et de petits paquets qui s'entassaient - sûrement les lecteurs MP3 jetés en vrac dans un grand sac. Ce bruit s'arrêta brusquement alors que la jeune fille se contorsionnait pour éteindre son téléphone.

"C'est quoi ce truc ?", émit une voix interrogative.

"Aucune idée.", lui répondit son acolyte. "Laisse tomber, on a encore du travail...

"Non, non.", insista la première voix. "Y'a un truc louche là-dessous..."

Soudain la porte du bureau s'ouvrit et le noir, portant toujours sa casquette retournée, entra dans la pièce, tombant nez-à-nez avec Hazel.

"J'avais raison, y'a un truc pas normal, ici !", s'exclama "monsieur Kurt" d'une voix surprise. "Tu fous quoi ici, gamine ? Comment es-tu entrée ?"

Une chose était certaine, l'homme ne semblait pas ravi de tomber sur une intruse.

Oups.

Hazel grinça des dents en voyant la porte s'ouvrir. Elle était foutue. Posant un regard à la fois surpris et effrayé, elle recula d'un pas, en voyant l'homme. Au moins, elle était tombée sur le moins agressif des deux. Restait à voir comment elle allait se sortir du mauvais pas.

"Ben... La porte était ouverte."

Ce qui était vrai. Ils étaient partis avec leurs premiers cartons sans avoir pris soin de refermer après tout. Elle aurait très bien pu pénétrer dans l'immeubles tandis qu'ils étaient trop occupés à charger leur fourgon.

"Mais madame Kinston est pas là pour la danse."

Ce qui justifiait le fait qu'elle soit dans le bureau, qui pourrait être justifiée par le fait qu'elle cherchait juste Margareth.

"Si vous voulez inscrire votre fille au cours, ça va être dur. Vous ne savez si elle compte donner son cours? Je dois attendre?"

Elle n'était qu'une gamine après tout. Ne pas remarquer un cagibi forcé sur le chemin pouvait être logique. Restait à savoir si son manège allait passer ou pas.

Indécis, "monsieur Kurt" restait sur le pas de la porte, hésitant sur l'attitude à adopter. La défense adoptée par la jeune fille semblait porter ses fruits, perturbant le malfrat.

"Qui est là ?", intervint son complice.

Il entra à son tour, bousculant le noir sur son passage, avant de s'immobilisant net en reconnaissant Hazel.

"Merde ! Toi ? On te voit décidément trop souvent dans nos pattes !"

"Attend, Mike, elle dit peut-être la vérité.."

"Vérité, j'm'en fous !", trancha l'autre en sortant un revolver passé dans la ceinture dans son dos. "Qui qu'elle soit, elle en sait trop ! C'est une menace !"

Le dénommé Mike commençait à perdre son sang-froid, agitant son arme devant lui pour en menacer Hazel.

"Tu vas nous suivre et ne pas faire d'histoire. Au moindre geste suspect, je n'hésiterais pas à tirer !"

Kurt évarta les bras d'un air désolé et fit demi tour pour repasser dans l'entrée et ramasser un sac à paquetage rempli, posé par terre. Mike fit un signe à Hazel, l'incitant à passer devant lui. L'homme mit sa main armée dans la poche de son veston, appuyant ostensiblement le canon sur le tissu.

Râté. Si l'un était plutôt réceptif, l'autre, paranoïaque à l'extrême, y allait directement avec le flingue. Et les concepts de protection de l'enfance alors? Hazel prit un air subitement terrorisée, ce qui à vrai dire n'était pas bien compliqué vu qu'elle avait tout de même passablement peur. Il était clair que la brute était du genre à ne rien laisser traîner de potentiellement dangereux dans son sillage. Manque de bol, Hazel avait vu son visage, l'avait vu chez madame Kinston et en prime ici même. A la place du type, elle s'éliminerait tout simplement, dans un endroit discret, et larguerait le corps dans un lieu très éloignés de manière à brouiller tout lien possible avec un quelconque trafic. Une victime de plus d'un pédophile en somme.

Seulement il y avait une faille. Le noir, lui, semblait plus prompt à faire preuve de scrupules. L'écossaise tâcha d'étouffer un sanglot en répondant, sur un ton tremblant, sensiblement plus aigu.

"Mais... Mais j'ai rien fait moi! Pourquoi vous faîtes ça? Vous me faîtes peur!"

Comme dans les films à la télévision, elle leva les mains en signe de pur innocence, laissant ses grands yeux s'humidifier. Puisque le Mike se mettait dans son dos, elle avança sans trop se précipiter. Plusieurs scénarios lui passèrent par la tête. Hurler à la mort une fois dans la rue? Essayer de faire tomber Mike dans les escaliers? En tous les cas, la présence d'une arme signifiait qu'il pourrait y avoir des blessés, ou des morts. En pleine ville, ce n'était pas franchement prudent. Mais au moins, il y avait la dame bizarre de la ruelle. Si possible, avec Mike dans le dos, elle arriverait à l'apercevoir et à articuler un "help" silencieux à son intention. Au moins pour le moment, elle avait toujours son téléphone dans la poche. Mais pour combien de temps? Baxton aurait-il la présence d'esprit de prendre son raccrochage pour un signe et d'essayer de trianguler la position de son portable? Mieux valait ne pas compter dessus, par prudence.

"Ne complique pas les chose et obéis.", intervint Kurt, d'une voix douce mais ferme. "Si tu ne fais pas l'idiote, il ne t'arrivera rien."

Parvenu au bas des escaliers, le petit groupe se dirigea vers la camionnette blanche. Pour faire les quelques mètres à l'air libre sur la chaussée, Mike avait empoigné Lucy en posant sa main gauche sur l'épaule de la jeune fille, tout en maintenant le revolver braqué sur elle à travers la poche du blouson.

Pendant le déplacement, Kurt observait prudemment les environs, à la recherche de tout signe suspect. Balayant la rue de son regard, Hazel crut distinguer un rapide mouvement provenant d'une porte cochère, comme la tête d'une jeune femme se rejetant brusquement en arrière.

Après avoir mis le sac à paquetage dans le coffre, le noir ouvrit la porte arrière du véhicule pour y faire monter l’Écossaise, légèrement poussée par un Mike plutôt nerveux qui s'assit sur la banquette à côté d'elle afin de ne pas la perdre de vue.

Kurt se glissa derrière le volant et tourna la clé de contact.

La nana était là, mais trop loin et trop planquée pour percevoir un quelconque signe. Au moins, elle aurait tout le loisir de les voir embarquer une fillette en plus de matériel louche. Docile, Hazel monta dans le véhicule. C'était peut-être aussi l'opportunité de trouver qui tirait les ficelles. Il y avait peu de probabilité que ces deux hommes soient le cerveau complet de l'histoire. Les manipulateurs se cachaient mieux que ça.

Jouant le jeu, l'écossaise réprima un sanglot, et laissa une larme rouler sur sa joue. Un peu recroquevillée sur la banquette, elle tâchait de jeter des coups d'oeil par les vitres visibles, histoire de voir quelle direction prenait la camionnette. Elle renifla bruyamment et croisa les bras en se repliant d'avantage, simulant quelques tremblements angoissés.

"Monsieur... Ramenez-moi à la maison... S'il vous plait... Je veux rentrer chez moi..."

C'était plus des baragouinages qu'autre chose. Geignant comme l'enfant effrayée qu'elle était. Elle essaya de voir si sa position lui permettrait de presser sur la touche d'appel de son téléphone pour rappeler le dernier numéro reçu. S'il s'agissait de Baxton, il pourrait au moins entendre ce qui se disait dans la camionnette. Sinon... Tant pis.

La camionnette démarra brusquement et se fondit dans la circulation. Sur la banquette arrière, Hazel, qui jouait aux gamines effrayées, eut juste le temps de reconnaître la silhouette de la femme observée un peu plus tôt au moment où le véhicule passait devant la cachette. Tout dans l'attitude des deux homme trahissait l'amateurisme le plus complet ce qui était à la fois rassurant et effrayant. D'un côté, la jeune fille semblait être en présence de simples voleurs, pas de criminels endurcis capables de tuer quelqu'un sans sourciller. D'un autre, ces attitudes de débutants sous-entendaient des personnes inexpérimentées, ne possédant pas le sang-froid de "professionnels" et susceptibles de craquer en ayant des réactions irréfléchies.

Glissant la main dans sa poche, aussi discrètement que possible, l'agent saisit son téléphone et tenta d'activer à tâtons la touche d'appel automatique. Ces mouvements suspects finirent pas attirer l'attention de Mike dont la nervosité était à fleur de peau.

"Eh, tu fais quoi là ?", s'exclama-t-il en se penchant vers Hazel.

Empoignant brutalement le bras de la jeune fille, il fouilla rapidement celle-ci et eut tôt fait de trouver le smartphone.

"Merde ! Espèce de garce !", beugla-t-il en décochant une claque à l’Écossaise. "Tu essayais d'appeler qui, là ?"

Sortant le téléphone, il ouvrit la fenêtre et le lança dehors d'un même geste, sans prendre la peine de vérifier l'état de l'appel.

"Doucement, Mike...", intervint le conducteur, d'une voix un peu plus posée. "Tu ferais mieux de lui bander les yeux qu'elle ne se repère pas pendant le trajet..."

"Lui bander les yeux...", répéta Mike d'une voix idiote. "Euh oui, merde !"

Fouillant dans la portière, le malfrat sortit un chiffon à la propreté douteuse et l'attacha sur les yeux de la jeune fille, l'aveuglant complètement.

"Si tu fais mine d'essayer de le retirer, tu le paieras très, très cher.", la menaça-t-il, histoire peut-être de rattrapper la bourde qu'il venait de commettre.

Privée de moyens de s'orienter visuellement, Hazel essayait de mémoriser les durées et les différents changements de direction, mais finit par perdre toute notion de localisation. Au bout d'une vingtaine de minutes, elle sentit que le véhicule quittait la route goudronnée pour s'engager sur un chemin de terre. Quelques minutes de trous et d'ornières plus tard, la camionnette s'arrêta enfin.

L’Écossaise fut tirée à l'extérieur et retrouva soudainement la vue. Elle se trouvait dans la cour de ce qui semblait être une usine désaffectée. Le mur d'enceinte était partiellement éboulé par endroits. Tout semblait indiquer qu'aucune activité (légale du moins) n'avait cours en ces lieux. Les bâtiments, bien que possédant des façades lézardées, étaient en relativement bon état. Les toitures en particuliers étaient intactes.

Poussant et traînant Hazel, les hommes entrèrent dans la construction la plus imposante et se dirigèrent vers le sous-sol. Arrivé devant une porte fermée, Kurt prit la clé qui se trouvait à un clou sur le mur juste à côté pour l'ouvrir. Mike poussa brutalement la jeune fille en avant et claqua la porte sur elle. Un bruit de clé dans la serrure lui indiqua qu'elle était emprisonnée.

L'agent eut à peine le temps de se remettre de sa surprise qu'un missile lui tomba dans les bras avec un cri angoissé.

"Hazeeeeeel ! Tu fais quoi ici ? Il se passe quoi ? Où est maman ?"

Reconnaissant avec surprise Janice, Hazel serra la gamine contre elle, tout en faisant un rapide tour d'horizon de la cellule où elle venait de se faire enfermer. La petite pièce obscure n'était éclairée que par une lumière diffuse provenant d'un soupirail barreaudé au niveau du plafond, à un peu plus de deux mètres du sol. Un simple matelas gisait dans un coin et devait être prévu comme couchage pour la jeune prisonnière.

Encore râté. Au moins, le type n'eut pas la présence d'esprit d'écouter les premiers mots du destinataire de l'appel. Encaissant la claque, Hazel saisit l'opportunité pour se mettre à pleurer à chaudes larmes. Prise de sanglots, elle pesta intérieurement contre l'éclair de génie du chauffeur. Quelle idée de lui bander les yeux! ça, c'était autrement plus gênant. Encore heureux qu'ils n'avaient pas fouillé son sac dans l'appartement ou la présence du micro lui aurait peut-être valu une balle entre les deux yeux. Incapable de réellement mémoriser le parcours, elle préféra mettre à parti ce temps pour tâcher de réfléchir posément, tout en maintenant le jeu des sanglots étouffés.

Il était clair qu'elle ne pouvait se permettre d'attendre sur une quelconque aide extérieur. Mieux valait partir du principe qu'elle était seule. Elle restait dans le flou totale tant qu'elle ne saurait pas où elle allait atterrir. Néanmoins, la perspective de trouver leur planque, voire même d'avoir des nouvelles de madame Kinston et sa fille, rendait le kidnapping plustôt séduisant. Si elle la jouait suffisamment finement, elle remplirait sa mission au-delà de ses propres espérances.

Une fois à destination, Hazel cligna des yeux quand on lui retira le bandeau. Le lieu ne lui disait strictement rien, mais au moins, les éboulements du mur d'enceinte laissaient plusieurs opportunités de fuites. Enfin à supposer qu'elle arrive déjà à sortir de la pièce où elle serait immanquablement enfermée. Elle nota les toitures intactes, élément essentiel quand il fallait stocker du matériel à l'abri des éléments. S'agissait-il uniquement de recel? Il pouvait y avoir tout et n'importe quoi ici. Elle émit une faible résistance, le temps de mieux détailler. Y avait-il des gardes? De la surveillance vidéo? De quelconques systèmes de détection? Au moins, la clé qui permettait de fermer la cellule était à proximité. Son seul regret majeur était de ne plus avoir son pistolet à aiguilles sur elle.Il lui resait toujours les épingles qui maintenaient son chignon pour le cours de danse, mais elle n'était pas vraiment experte en la matière.Une fois enfermée, elle n'eut pas vraiment le temps de se poser la question.

"Janice?"

une bonne chose de faite. Séquestration d'enfant en prime, ces types allaient morfler face à un tribunal.

"Tu es ici depuis combien de temps? Je n'ai pas vu ta mère. Ils m'ont enlevée dans la salle de danse, je ne sais pas ce qu'ils veulent. Tu sais toi? Comment tu as été emmenée ici?"

Certes elle l'assomait de question, mais toute info était bonne à prendre. En attendant, elle en profita pour chercher une faille quelconque dans cette pièce transformée en cellule.Ou si elle avait la possibilité de se saisir de la clé au mur, pour autant que personne ne fasse le pied de grue derrière la porte et qu'il y ait une ouverture dans celle-ci.

La "base arrière" des malfrats n'était vraiment pas un modèle en matière de sécurité. Aucun système d'alarme n'était visible depuis la cour, pas la moindre sirène ni la moindre caméra de surveillance. Un homme en pardessus beige, casquette vissée sur la tête faisait les cent pas un peu plus loin, les mains enfouies au fond des poches. Tout cela accentuait encore le sentiment d'amateurisme qui entourait ce trafic. On avait vraiment l'air d'être à centi lieux du grand banditisme ou du crime organisé.

Dans la cellule, Hazel serrait contre elle Janice. Bien qu'à peine plus jeune que l'agent, la fillette semblait vraiment terrifiée.

"Des gens sont arrivés ce midi à la maison. Ils avaient l'air furieux et ont crié très fort sur maman.", commença-t-elle à expliquer, des sanglots dans la voix. "Ils disaient qu'elle les avait trahi, qu'ils étaient repérés à cause d'elle. Tu comprends ce que ça veut dire, toi ?"

Reniflant, la gamine essayait de retenir ses larmes.

"Ils nous ont mis dans une voiture et emmené ici. Je sais pas ce qu'ils nous veulent, ni où est maman... Tu vas nous sauver, hein ? Dis ?"

Se mettant brusquement à pleurer, Janice plongea le nez dans les vêtements d'Hazel, se mouchant à moitié dans le tissu.

La petite cellule offrait vraiment peu de possibilités d'en sortir. Ses seules issues visibles en étaient la porte par laquelle l’Écossaise était entrée ou le petit soupirail en hauteur. Le panneau de bois de la porte était en chêne massif et ne présentait aucune ouverture. Sa serrure semblait toutefois assez grossière. La petite fenêtre se tenait à environ deux mètres du sol mais paraissait condamnée par des solides barreaux en métal. L'espace entre deux barreaux pourrait peut-être permettre le passage d'une personne de petite corpulence, à condition d'arriver jusque là et de se contorsionner pour passer au travers. Quand aux murs, il s'agissait de parois en béton quoiqu'un endroit laissât entrevoir des briques rouges derrière la couche de plâtre.

Oups. La trahison, c'était à cause d'elle. Le matériel n'avait pas été suffisamment bien planqué. Ou alors ils avaient un as de l'espionnage planqué dans leurs rangs. Tenant Janice dans ses bras, elle tâcha de la réconforter au mieux, jouant les amies compatissantes. Mine de rien, elle trouvait Janice adorable. Bien trop fragile, mais adorable. Elle secoua la tête, pour répondre à la question de sa camarade de danse. Comment pourrait-elle le savoir? Elle n'était qu'une fillette venue prendre des leçons de danse. Hem.

Pour ce qui était de madame Kinston, Hazel n'avait pas la plus petite idée de où elle se trouvait. Probablement enfermée ailleurs. Séparer la mère de la fille n'était pas idiot d'un point de vue stratégique. C'était toujours un bon moyen de faire monter la pression. L'ignorance était un excellent renforçateur de la peur. Pourtant, elle ne pouvait s'empêcher de penser que si Margareth était considérée comme une traîtresse, elle serait certainement questionnée, et pas nécessairement de la façon la plus courtoise qui soit. Et vu la présence de la femme étrange non loin de l'appartement de danse, Hazel commença à considérer l'hypothèse que Margareth puisse vraiment jouer double jeu. A moins que Baxton n'ait oublié de lui préciser qu'il avait d'autres agents sur le coup.

La dernière question de Janice la mit franchement mal à l'aise. D'où qu'elle avait vu qu'elle devait les sauver? Son ordre de mission consistait à trouver des preuves, pas de jouer aux héros. Hazel n'était pas un héros. Mais le fait était qu'elle se retrouvait avec une gamine terrorisée sur les bras. Certes adorable, mais niveau boulet potentiel, on faisait rarement mieux. D'autant plus qu'elle-même était loin d'être un agent d'exception. Elle n'avait pas les qualifications nécessaire pour faire du zèle. Pourtant...

"On va sortir de là, tu vas voir. Et on va trouver ta maman."

Rôle ou pas rôle? Même l'écossaise ne savait plus trop où se placer à présent. Elle s'empêcha à merveille d'afficher la moindre moue dégoutée. Merci pour la morve, Janice. Yeurk! Bon. Il faudrait encore sortir d'ici. Récapitulons: murs de briques recouverts de plâtre, fenêtre à barreau, porte à vieille serrure. Les barreaux étaient en hauteur. Même si elle réussissait à grimper là-haut, ce n'était pas dit qu'elle puisse passer. Certes, Hazel était souple et fine, mais probablement trop grande pour réussir à passer assez vite pour ne pas se faire remarquer, voire même à passer tout court. Restait la porte.

"Mais pour ça, il faut d'abord quitter cette pièce."

S'écartant de Janice, la jeune fille se rapprocha de celle-ci et y colla l'oreille, cherchant le signe d'une quelconque présence humaine dans le couloir. Si le silence s'imposait, elle pourrait toujours tenter de crocheter la serrure avec les multiples épingles qui retenaient son chignon.

Apaisée par les paroles rassurante d'Hazel, Janice eut un petit sourire triste avant se se détacher de sa nouvelle amie. La confiance de la gamine faisait plaisir à voir et mettait une pression supplémentaire sur les épaules de l'agent. Ne quittant pas cette dernière des yeux, la fillette alla vers la vieille table en bois qui trônait au milieu de la pièce transformée en cellule et tira un tabouret en ferraille avant de s’asseoir dessus.

S'approchant de la lourde porte, Hazel colla son oreille contre le montant. Aucun bruit n'était perceptible. Piochant une épingle dans son chignon, elle la tordit et commença à triturer l'intérieur de la serrure, cherchant à se concentrer sur sa tâche, revoyant en pensée les gestes maintes fois répétés à l'entraînement.

Transpirant légèrement d'application, l’Écossaise se maudissait mentalement. Pourquoi avait-elle autant négligé cette partie de sa formation, se reposant entièrement sur le pistolet à aiguilles ? Maintenant qu'elle n'avait pas cet outil sous la main, elle se trouvait bien bête.

En plus, la voix étonnée de Janice se faisait entendre derrière elle.

"Mais, tu fais quoi, là ? T'as appris où à faire des trucs comme ça ?"

Absorbée par sa tâche, Hazel ne prenait pas la peine de répondre et, brusquement, un claquement sec se fit entendre. Le système de fermeture venait de se déverrouiller.

Entrouvrant la porte, la jeune fille glissa la tête par l'ouverture. Le couloir était désert. À quelques mètres sur la droite, un escalier montait, chemin apparent vers la liberté.

Très franchement, elle aurait pu être plus attentive. Mais se faire enfermer n'avait pas fait parti de ses plans d'origine. A présent qu'elle s'énervait sur cette fichue serrure pourtant archaïque, elle regrettait de ne pas prêter plus d'attentions aux travaux pratiques et manuels. Il fallait dire qu'à ses yeux, un agent était bon principalement s'il en avait dans le crâne. Mais force était de constater que les talents se devaient d'être diversifiés.

Janice avait le mérite de rester sage pendant ce temps. Bien que la perspective de se retrouver avec un fardeau aussi naïvement rassuré avait de quoi la stresser. Sauver ses miches, c'était une chose. Sauver une autre fillette et devenir un héros, c'en était une autre. Si elle avait été plus réfléchie, elle aurait mieux planqué la caméra et le micro, et madame Kinston et Janice n'en seraient pas là. Margareth répondrait de ses actes en compagnie de son avocat et Janice serait en sécurité, entre les mains d'un autre membre de la famille ou d'un employé du social avec un minimum de compétences. Au lieu de ça, la gamine s'était vue séparée de sa mère et enfermée dans une sombre cellule par des brutes fort peu charitables. Finalement, l'appellation de héros n'était bien attribuée qu'à ceux qui avaient suffisamment merdés pour être obligés de faire un truc exceptionnel pour rattraper le tir. Triturant la serrure, Hazel fut perturbée dans sa concentration par la question somme toute innocente de Janice. Elle ne se retourna pas.

Il faudrait un miracle pour que cette serrure cède. Combien de temps allait-elle passer dessus? Ne serait-il pas plus simple d'envoyer Janice par le soupirail? Non. Lâcher une fillette effrayée au milieu de types potentiellement armés serait vraiment faire preuve d'un manque de jugeote. Il y avait une différence entre un agent du CHERUB et une jolie danseuse, aussi brillante soit-elle dans son art. Le claquement de la serrure provoqua sur le visage d'Hazel un air de profond étonnement. Fallait-il qu'elle commence à devenir croyante? Incrédule, elle poussa discrètement la porte et jeta un coup d'oeil. Personne. Bien! Se redressant, elle se tourna vers Janice et apporta une explication très surfaite.

"Je suis une fan de James Bond."

007 avait-il déjà dû crocheter une serrure? Bonne question!

"On va s'en aller, d'accord? Mais il ne faudra pas se faire remarquer. Avant de sortir, je veux que tu me promette de rester près de moi, et de ne faire que ce que je te dirai, sans poser de question. Tu es d'accord?"

L'air très sérieux, Hazel fixait Janice. Si elles devaient croiser Margareth, la dernière chose qu'elle voudrait, ce serait bien que Janice se précipite dans les bras de sa mère sans aucun regard pour leur discrétion. Ceci fait, il était temps de raser les murs et de rejoindre l'escalier, à pas de loup, guettant le moindre son signalant la présence d'une autre personne.

À l'ouverture de la porte, Janice avait sauté sur ses pieds, l'air plein d'espoir.

"Tu as réussi.", s'exclama-t-elle admirative. "Oui, oui je te suis. Je promets, je ferai tout ce que tu me diras..."

Simple promesse spontanée d'une fillette effrayée ou véritable assurance réfléchie qui serait suivie d'effets, l'avenir le dirait...

Remontant silencieusement l'escalier, Hazel gravissait les marches une à une, attentive au moindre bruit. Prudemment, elle refaisait le chemin inverse que lui avait fait suivre ses ravisseurs. Le long du couloir, quelques portes fermées furent passées rapidement. La sortie était proche.

Arrivant au niveau d'une nouvelle pièce, un bruit de conversation étouffée parvint à ses oreilles. L’Écossaise crut reconnaître la voix de Marageth Kinston s'adressant à un parfait inconnu.

"J'vous assure que Janice n'est au courant de rien."

"Ça ne nous dit pas qui a posé ces micros, ma chère Margareth, ni qui est cette fouineuse que Kurt a ramenée..."

"Hazel ? C'est une pauvre gamine, moyennement douée pour la danse. Elle est inoffensive... Kurt a fait une erreur en l'emmenant ici, et..."

"En tout cas, la planque en ville est grillée. Et toi aussi... Il est trop tard pour que tu arrêtes tout."

"Je ferai tout ce que tu voudras, mais ne fais rien à Janice par pitié."

L'oreille collé au montant, Hazel ne perdait pas une miette de la conversation lorsque le coude de la petite rouquine se planta dans ses côtes.

"Tu fais quoi, là ?", demanda-t-elle, heureusement en chuchotant.

La sortie était devant elles, au bout du couloir et la fillette ne comprenait pas ce qui pouvait bien retenir l’Écossaise à cet endroit. A ce moment, un bruit de pas traînant se fit entendre dans leur dos, accompagné des soufflements de personnes produisant un effort. Du monde semblait approcher et se diriger vers elles, arrivant du couloir déjà parcouru.

Au moins, Janice semblait pour l'instant accepter de suivre docilement. Restait à déterminer si elle serait capable de le faire sur du long terme. Dans le couloir, Hazel prêtait une oreille attentive. Les voix qu'elle entendit la firent s'arrêter. madame Kinston devisait avec un illustre inconnu. Il était intéressant de noter qu'elle avait réussi son intégration à la perfection. Passer pour innoffensive était l'objectif parfaite, même si son égo fut immanquablement piqué par le "moyennement douée pour la danse". Bien sûr qu'elle était moyennement douée! Elle s'appliquait mais ne s'était en aucun cas donnée à fond. Seules les personnes moyennes passaient inaperçues. Un poil vexée tout de même, Hazel eut honte de son propre ressenti. Elle avait fait son boulot, point barre. C'était une erreur de laisser ce genre de détail superficiel la toucher. De toute manière, elle avait la preuve que contrainte ou pas, Margareth était coupable de recel, et probablement même de complicité de vol. Si ce n'était pire. Les infos, elle les avaient. Maintenant, il fallait filer.

L'écossaise plaça un doigt sur ses lèvres, intimant silencieusement Janice à se taire. Le bruit d'une avancée laborieuse derrière elle pressa leur marge de manoeuvre. Il fallait dégager d'ici et en vitesse. A nouveau prisonnière, voire pire, éliminée, elle ne servirait plus à grand chose. Partant du principe qu'au milieu de malfrats, Margareth était visiblement incapable de veiller convenablement sur sa fille, il était claire que Janice serait du voyage. C'était triste, la petite allait terminer en foyer d'accueil. Réitérant l'ordre de silence à Janice, Hazel s'empara de la main de celle-ci et l'entraîna vers la sortie. Elle ne comptait pas se jeter dehors sans avoir au préalable vérifié que'une autre personne ne traînait pas par là, mais elles ne pouvaient pas rester ici.

Dans la mesure du possible, il fallait quitter l'enceinte de l'usine et suivre le chemin emprunté par les véhicules. Peut-être qu'elle rêvait, mais si la camionnette était là, clés sur le contact, elle aurait une occasion de fuite en or, et en prime peut-être même le contenu du coffre pour Baxton. Il suffirait par la suite d'accidenter le véhicule dans un endroit visible et hop! Pas besoin de mandat pour que les forces de l'ordre l'ouvre. Mais ça, c'était une autre histoire.

[HRP]Félicitations Tu as eu l'honneur d'écrire le 200^ème post du forum... Continue comme ça...[/HRP]

Rapidement, pressées par les pas qui se rapprochaient d'elles, les deux jeunes filles se hâtèrent vers la sortie. Ouvrant la porte qui menait à l'extérieur, tenant toujours Janice par la main, Hazel s'avança d'un pas pour vérifier que la voie était libre avant de sortir. Elle se sentit brusquement tirée par une main ferme, entraînant la rouquine avec elle, et eut la surprise de se retrouver face au canon d'un fusil d'assaut. Derrière cette arme, un homme en gilet pare-balle sur lequel était inscrit "Police" en lettres blanches.

La cour de la fabrique désaffectée avait été envahi par une bonne vingtaine de membres des forces de l'ordre. À une quinzaine de mètres de là, mains menottées dans le dos, deux hommes étaient emmenés à l'écart.

Apercevant les deux enfants, une femme, en qui l’Écossaise reconnut la joggeuse entrevue deux jours plus tôt, se dirigea rapidement vers elles, faisant signe aux policiers de baisser leurs armes.

"Ça va ? Vous n'avez rien ? Je suis l'inspecteur Marshall de Scotland Yard. Ils ne vous ont rien fait ? Venez avec moi...."

Tout en suivant la femme policier, Hazel put constater que l'ensemble de la zone était bouclé. Les forces de l'ordre contrôlaient toutes les issues. L'assaut final était proche mais celui qui était à la manoeuvre semblait préférer y aller doucement et ne prendre aucun risque.

Janice intervint d'une voix geignarde.

"Ma maman est à l'intérieur...Ne lui faite aucun mal, je vous en supplie..."

Une voix bourrue, qu'Hazel reconnut comme étant celle du superintendant Matthew Baxton, coupa net les jérémiades.

"On connait notre travail, petite ! Tu n'as pas à t'inquiéter..."

L'homme était devant une voiture de police, entouré par deux de ses collaborateurs, un plan des entrepôts étalé sur le capot. Il regarda les deux filles avec un sourire rassurant. Rien dans son attitude n'indiquait qu'il connaissait Hazel.

[HRP] Quelle classe, non? XD [/HRP]


Nom de... Pendant un instant, Hazel vit les très courtes séquences du film de sa vie lui passer devant les yeux, sur fond de canon de fusil d'assaut. L'écossaise jeta, un regard impressionné sur le personnel déployé pour mettre à arrêter les malfaiteurs. Pas de raison de se soucier d'un quelconque gardes, Janice allait être en sécurité dorénavant. Le moins qu'elle pouvait dire, c'état que si Baxton n'était pas de la première efficacité pour trouver et lui transmettre les infos liées aux données qu'elle lui avait trouvé, il était au moins plus que rapide pour ce qui était de mettre en place un assaut. Elle jeta un rapide coup d'oeil aux types embarqués. Ceux à l'intérieur n'allaient pas tarder à suivre.

Elle reconnut finalement en la femme brune la coureuse blonde de l'autre jour. a distance d'avant ne lui avait pas permis de reconnaître avec certitude. Comme quoi les circonstances et une nouvelle couleur de cheveux pouvaient faire des miracles. Jouant les enfant encore toute émotionnée par les événements, Hazel pressa la main de Janice dans la sienne et continua de l'entraîner loin du bâtiment. En tous les cas, sa mère allait être mal barrée. Si elle se faisait mettre en détention le temps de l'enquête, la petite danseuse allait finir en famille d'accueil. Elle secoua la tête, assortissant un faible "non" à sa gestuelle. Une claque ne comptait pas vraiment comme quelque chose d'horrible, c'était même largement secondaire pour Hazel. Ils s'étaient contentés de l'enfermer et ne l'avaient pas gardée assez longtemps pour lui faire quoi que ce soit.

La pauvre Janice se souciait déjà de sa maman. Pauvre enfant. Baxton remplissait son rôle en assurant également la couverture de l'écossaise en faisant mine de ne pas la connaître. Tant mieux. Maintenant restait à déterminer la suite. Hazel avait quasiment terminé sa mission. Ne restait qu'à confirmer quelques données à son contact avec ce qu'elle avait entendu dans le bâtiment, mais pour ça, il allait falloir éloigner Janice. Le seul pépin dans l'immédiat était qu'il allait être impossible de renvoyer la fillette dans une maison vide et Hazel ne se sentait pas le coeur de lui dire ouvertement ce qu'elle avait entendu dans ce foutu couloir. Elle se tourna pourtant vers sa camarade.

"Ne t'en fait pas. Puisque la police est là, tout va s'arranger."

Elle n'y croyait pas un seul instant. Les problèmes n'allaient faire que commencer pour Janice. Même innocente et contrainte, sa mère allait devoir payer pour complicité. Après tout, elle avait clairement profité des bénéfices de son trafic. Sa peine serait probablement allégée, mais ça allait en tous les cas être dur à vivre pour la fillette. Elle afficha pourtant un air qui se voulait parfaitement rassurant pour glisser un regard rapide sur le plan. Elle pourrait au moins lui dire où se trouvait Margareth et spécifier qu'elle était avec une seconde personne, mais ces infos ne seraient peut-être plus d'actualité et l'assaut allait en tous les cas être lancée avant qu'elle ait pu en parler avec le surintendant. Tout ce qu'elle pourrait faire pour le moment, ce ne pourrait être que pour Janice. Elle se reporta sur celle-ci.

"Viens, allons nous asseoir en attendant ta maman."

Elle entraîna la rouquine derrière le véhicule, de manière à ne pas gêner les forces de l'ordre, tout en restant à portée de vue de Baxton. Pour sa couverture et pour le bien de l'assaut, il valait mieux dans l'immédiat qu'elle se tienne à l'écart. Tenant fermement Janice, Hazel essayait de voir autant que possible ce qui se passait.

L'inspecteur Marshall revenait déjà vers les deux filles. S'efforçant de prendre un ton apaisant, elle sourit à Janice.

"Tu veux bien venir avec moi ? J'ai des choses à te montrer...", demanda-t-elle à la rouquine avant de se tourner vers Hazel. "Le superintendant voudrait vous parler avant de lancer l'assaut. Pourriez-vous le rejoindre ?"

Après un regard interrogateur rassuré par l'approbation de l’Écossaise, Janice se décida à suivre la femme qui l'emmena près d'un véhicule et lui mit une large couverture sur les épaules. Hazel, quant à elle, rejoignit Matthew Baxton qui venait de renvoyer ses adjoints pour donner les dernières directives avant l'assaut.

S'assurant de se trouver hors de portée de voix, l'ancien agent de CHERUB et actuel membre à part entière de Scotland Yard murmura.

"Ça n'a pas été trop dur, Hazel ? Désolé de ne pas être intervenu plus tôt. Dès que j'ai eu connaissance de la découverte des micros, j'ai essayé de te prévenir mais trop tard apparemment. Tu étais déjà retournée au studio de danse... Heureusement que j'avais placé une de mes subordonnées en planque discrète. Elle a donné l'alerte dès qu'elle a assisté à ton enlèvement et est parvenue à vous suivre. Mes équipes d'intervention étaient prêtes et j'ai décidé de hâter les choses. J'hésitais encore à donner l'assaut, ne sachant pas très bien où tu te trouvais mais maintenant que tu est saine et sauve, nous allons pouvoir agir."

L'homme avait les traits tirés de quelqu'un qui n'avait pas dû passer une nuit complète depuis un petit moment. Le soulagement était nettement perceptible dans sa voix mais il s'abstenait toujours de toute manifestation extérieure, laissant à supposer qu'il connaissait la jeune fille.

"As-tu des infos à nous donner sur la disposition des lieux ou le nombre de personnes se trouvant à l'intérieur ?"

L'attente ne fut pas bien longue. La jeune femme de Scotland Yard était déjà de retour, avec les excuses qu'il fallait pour éloigner Janice et lui permettre de parler avec Baxton. Hazel qui s'était redressée à son approche hocha docilement la tête.

"Oui, inspecteur."

Elle lança à Janice un regard encourageant agrémenté d'un petit sourire quand elle se fit emporter par cette Marshall (un nom de circonstance!). Après avoir attendu les secondes nécessaires pour que son amie soit hors de vue, elle se rapprocha du superrintendant. Certaines informations auraient gagné à être transmises plus tôt, c'était un fait. Mais elle estimait aussi avoir passablement foirer sa mission. Il allait falloir qu'elle apprenne à diversifier ses compétences si elle voulait être à la hauteur. Déjà le fait que son matériel ait été repéré témoignait d'une grossière bourde. Sans ça, la mission se serait terminée avec beaucoup moins de déploiement de moyens policiers. Machinalement, elle secoua la tête à la première question de Baxton. Bien sûr qu'elle avait eu peur! Mais elle n'allait certainement pas en faire part à son contact. Son job nécessitait aussi un contrôle de ses propres émotions et il était hors de question qu'elle rajoutes ces dernières à la liste des choses qu'elle ne savait pas gérer. Elle fut pourtant touchée de constater que la vie d'un agent restait suffisamment importante pour ne pas balancer inconsidérément un assaut. Mais ce qu'elle trouva le plus surprenant, c'était les traits tirés, signe d'une inquiétude certaine. Cette mission avait dû lui tenir tout particulièrement à coeur. Heureusement, maintenant que Janice était sauvée, il allait pouvoir dormir sur ses deux oreilles... Jusqu'à la prochaine mission du même genre. Gardant l'air distant de la fillette face à un inconnu, elle se rapprocha du plan.

"Il y a au moins quatre personnes dans ce bâtiment, incluant Margareth Kinston. Quand nous avons quitté le sous-sols, celui-ci semblait désert. Mais il serait tout de même prudent de ne pas partir du principe que personne ne pourrait arriver par là. Madame Kinston se trouvait dans cette pièce avec un homme dont je ne connais pas la voix. Ce qui nous a fait sortir rapidement étaient des bruits de pas. Au moins deux hommes arrivaient de cette direction, en transportant des choses lourdes. Il m'a été donné de voir qu'ils pouvaient être armés."

En expliquant, elle pointa rapidement du doigt les lieux pour appuyer ses dires, spécifiant le nombre de portes aperçue, et tout mobilier éventuellement vu. Elle précisa.

"Il est possible que Madame Kinston agisse sous la contrainte. Lui dire que sa fille est en sécurité la poussera probablement à se rendre facilement. Les dénommés Mike et Kurt sont selon toute vraisemblance uniquement des hommes de mains. Même si le second semble plus renseigné que le premier sur le meilleur moyen d'enlever un enfant. Oh, et je suis navrée de ne pas avoir suffisamment bien dissimulé le matériel et de vous avoir forcé à précipiter les choses."

Prendre ses responsabilité pourrait aussi permettre à son contact de relativiser les risques pris.

Devant ces informations précises, Matthew Baxton eut un petit sourire satisfait. Au moins ses hommes sauraient dans quoi ils allaient mettre les pieds, ce qui allait réduire les risques de l'intervention.

"Parfait Hazel, merci.", la félicita-t-il. "Je vois que vous être presque aussi bien formés maintenant que nous ne l'étions à l'époque... Et ne t'inquiète pas. D'après les enregistrements, la découverte du matériel de surveillance tient plus du hasard que de la négligence de ta part. C'est moi qui aurait dû placer quelqu'un en écoute permanente plutôt que de traiter les bandes une fois par jour. Ça m'aurait permis d'être informé en temps réel et ne t'aurait pas exposée. Il est vrai qu'on n'aurait pas eu connaissance de cette planque. Enfin, bref, les choses se terminent bien. Reste à l'écart maintenant, ta mission est terminée..."

Se redressant, le superintendant rappela ses adjoints pour leur communiquer les dernières précisions apportées par Hazel. Des ordres claquèrent à voix basse et les policiers terminèrent leur mise en place.

Un coup de sifflet strident retendit, immédiatement suivi de plusieurs explosions assourdissantes. Protégés par leurs gilets pare-balles, les forces de l'ordre lançaient l'assaut. Des cris brefs se firent entendre, ainsi que des bruits de courses, un coup de feu auquel répondit une courte rafale d'arme automatique puis, plus rien, le silence s'installa.

Quelques instants plus tard, un policier ressortit, ouvrant la voie à ses camarades. Au milieu des hommes de Scotland yard, tête baissée, se trouvaient les malfaiteurs, menottés. Margareth Kinston était là, accompagnée de Kurt et d'un homme inconnu. Instinctivement, Hazel regarda dans la direction où aurait dû se trouver Janice. La fillette n'était pas visible, ayant déjà été emmenée en lieu sûr par l'inspecteur Marshall.

Enfin, gisant sur un brancard, un pansement au niveau de l'épaule,le dénommé Mike fut également sorti. Le coup de filet semblait avoir été parfaitement exécuté à en voir le petit sourire ravi sur le visage de l'ancien agent de CHERUB.

Laissant quelques hommes finir de sécuriser les lieux, le superintendant fit procéder à l'évacuation des prisonniers avant de revenir vers Hazel.

"Je ne peux pas te ramener avec moi., s'excusa-t-il à voix basse. "Ce n'est pas la procédure... Une ambulance t'amènera à l'hôpital pour des examens de routine. Tu seras récupérée un peu plus tard. Nous ne devrions plus nous revoir sur cette affaire mais j'ai été heureux de travailler avec toi. Au plaisir de croiser de nouveau ta route, au pire au Campus lors d'une de nos réunion d'anciens..."

Faisant un petit signe de la main, il donna le feu vert à deux infirmiers pour s'approcher et prendre en charge l’Écossaise. Après quelques heures à l'hôpital, une dame se présentant comme étant sa mère (pièces d'identité parfaitement en règle à l'appui) vint la chercher...

[HRP]Ta mission est maintenant terminée. J'espère que tu as eu autant de plaisir à la jouer que moi à te la faire vivre.

Merci pour ton rythme soutenu et ton dynamisme. Tu peux ajouter 4 points à ton barème et es autorisée à poster dans l'enceinte du Campus où tu devrais retrouver quelques camarades.

Félicitation pour ton t-shirt gris, maintenant officialisé.

Tu peux, si tu le souhaites, réagir une dernière fois à ce sujet.[/HRP]

Comment ça "presqu'aussi bien formés"? Le niveau n'était pas le même à l'époque? La difficulté d'apprentissage d'autrefois s'était relâchée? Hazel se garda bien de faire tout commentaire. Néanmoins la remarque avait fait mouche. C'était probablement inconscient, mais il était clair que la réputation actuelle du CHERUB n'était plus aussi brillante pour au moins un ancien. Certes, c'était un autre temps, mais tout de même! Elle préféra ne pas trop laisser ce détail l'obnubiler pour l'instant. Parler de hasard pour son erreur était une façon délicate de tourner les choses. Mais le fait était qu'un bon agent contrôlait absolument l'entier de sa mission, hasard compris. Hazel avait encore pas mal de progrès à faire. Elle hocha simplement la tête, en accord avec son contact. Sa part du travail avait été faite. Certes pas bien brillamment, mais assez pour permettre l'arrestration de tout ce beau monde. Elle recula donc et se tint à l'écart, laissant les professionnels agir.

Sagement à distance, l'écossaise ne rata rien de l'intervention. Leurs actes parfaitement coordonnés impressionnaient Hazel. Le travail d'équipe restait encore trop obscure pour elle, incapable d'accepter d'intégrer la confiance dans une activité à haut risque. Le coup de feu la fit se crisper. Un certain soulagement se fit ressentir quand elle aperçu madame Kinston embarquée, mais indemne. Un rapide coup d'oeil confirmant l'absence de Janice termina de la rassurer. Peu après, un petit sourire purement mesquin échappa à l'écossaise qui se détourna promptement pour éviter que ce soit remarqué. Bien fait pour Mike! Elle se fustigea d'avoir eu une pensée purement basses et vengeresse sans la moindre utilité, mais bon Dieu, ça faisait du bien quand même! Elle se passa une mains sur les lèvres, le temps de reprendre contenance, et aperçu l'ancien agent du CHERUB visiblement satisfait.

C'en était terminé. Il ne restait plus qu'à l'évacuer, faire disparaître toutes traces de son passage, et elle réintégrerait le campus, en attente d'une prochaine mission. Au moins Baxton semblait satisfait de son travail sur ce coup. Hazel ignorait s'il lui serait donné de travailler à nouveau avec le superintendant. Elle en doutait, du moins pas avant un bon moment. Mais effectivement, il était toujours possible de le croiser par la suite sur le campus. Elle approuva.

"Oui, certainement. Merci."

Elle se laissa embarquer par les infirmiers. Il n'y aurait rien à trouver sur elle. Hazel n'avait pas été blessée. Elle conserva le silence et la méfiance propre à tout enfant durement éprouvé par une grosse frayeur le temps qu'il fallu. Quand sa "mère" se présenta, Hazel se précipita vers elle, pour jouer son rôle de fillette finalement rassurée par la présence familiale. Avant de repartir pour le campus, elle veilla à récupérer toutes ses affaires, qu'il ne reste aucune trace de son passage. Elle eut pourtant une petite pensée pour Janice. Son enfer à elle allait commencer à présent. Pourvu que cette histoire pousse son père à réapparaître sinon... Il n'y avait plus qu'à espérer qu'elle ait de la chance, et que sa mère ne prenne pas trop de temps de détention après procès.


[HRP] Merci pour cette intro! ^^ [/HRP]

Épilogue

Le coup de filet sur l'entrepôt fut un succès total. L'arrestation du chef du gang mit fin à un important réseau sévissant dans la région de Northampton et spécialisé dans le recel et les cambriolages en tout genre.

Margareth Kinston fut reconnue coupable de complicité dans le recel des objets volés mais elle ne fut condamnée qu'à une peine légère en raison de son repentir et de sa complète collaboration dans la suite de l'enquête. Sa fille Janice a été placée en foyer d'accueil en attendant la libération de sa mère.

L'homme mystérieux fut clairement identifié comme étant le chef de la bande et écopa de plusieurs années de prison. Les peines de Kurt, Mike et des autres complices interpellés s'échelonnèrent en fonction de leur implication dans les activités illicites.

Billy était un des nombreux gamins utilisés par les malfaiteurs pour transporter les objets volés. Il ne fut pas inquiété mais fit l'objet d'un suivi par une assistante sociale.

Ashleigh sembla vivre très bien la fin des cours de danse. Tout au plus manifesta-t-elle un peu de regret en ne revoyant plus son souffre-douleur attitré.

Le couple d'amoureux dut finir par trouver une chambre car Hazel ne les revit pas.

L'inspecteur Marshall poursuivit sa carrière au sein de Scotland Yard sans jamais soupçonner l'intervention de CHERUB.

Quant au superintendant Matthew Baston, il allait être vu, portant un t-shirt blanc sur le dos, en train de traîner au Campus en compagnie de certains membres de l'encadrement.